2001

Tournées et tournées de L’Ogrelet au Québec et en France.

Beloeil! Comment passer sous silence le travail de Serge Marois à L’Arrière Scène et de l’équipe du Centre dramatique pour l’enfance et la jeunesse en Montérégie? Travail de fourmi charpentière, patient et efficace… Là-bas, près du Richelieu paisible, le théâtre jeune public vit et vibre du répertoire qui s’écrit, se diffuse, grâce à l’accueil des compagnies du Québec et d’ailleurs. Une vraie réussite à moins d’une heure de Montréal que l’on doit à la très fine connaissance que l’Arrière-Scène a développée de son public et de sa région, à la très fine connaissance de son métier dans une écologie fragile qui concerne à la fois la culture et l’éducation, la fréquentation de l’art vivant et l’animation qui n’ont malheureusement pas toujours des objectifs communs et des approches similaires.

L’Ogrelet, mise en scène Gervais Gaudreault, Le Carrousel, 1997. François Trudel, Mireille Thibault. Photo: François-Xavier Gaudreault

L’Ogrelet, mise en scène Gervais Gaudreault, Le Carrousel, 1997.
François Trudel, Mireille Thibault.
Photo: François-Xavier Gaudreault

Mont-Laurier…
Un  nom, encore, sur lequel on ne peut pas passer rapidement. Les  souvenirs  débordent… Mont-Laurier, c’est Christine Bellefleur. Le courage et la ténacité, l’obstination fascinante. Elle, qui déjà avait monté de toutes pièces une salle temporaire pour accueillir Salvador, accueille cette année-là L’Ogrelet…  En 2015, l’année de notre 40e anniversaire, elle aura enfin sa salle magnifique et polyvalente pour recevoir Petit Pierre… Elle l’aura attendue cette salle, l’aura rêvée, pensée avec autant d’intelligence que de sensibilité. Elle aura parallèlement, réussi à rendre le théâtre obligatoire pour les enfants de Mont-Laurier… tous les enfants de Mont-Laurier auront été au théâtre durant leur cheminement scolaire. Est-ce possible?

Québec…
Les Gros Becs… encore une fois, tellement à dire… 1987, trois compagnies de la belle ville de Québec, le Théâtre du Gros Mécano, le  Théâtre des Confettis et L’Aubergine – auxquelles d’autres compagnies se joindront par la suite, créent un lieu de diffusion qui se donne à peu de choses près la même vocation que la Maison Théâtre à Montréal. Louise Allaire en prend la direction en 1994 et multiplie les accueils, les missions, les activités.  En 2001, c’est L’Ogrelet qu’elle reçoit. Il y a eu, le souvenir remonte à la surface vif et précis, Salvador il y a quelques années et la rencontre bouleversante avec la communauté latino de Québec… moment inoubliable… Au moment où vous lisez cette chronique… il y a déjà eu Le bruit des os qui craquent à l’automne. Il y aura… Gretel et Hansel au printemps 2015… La complicité artistique prend racine dans des actions culturelles.

La-Roche-sur-Yon…
Le Blanc Mesnil…
Neuves Maisons…
Maurepas…
Reze-Nantes…
Clamart…
Saint-Michel-sur-Orge…
Limoges…
Annemasse…
La Ricamarie…
Villard-Bonnot…
Epinay…
Arras…

Presque toutes ces villes de France sont des villes qui nous reçoivent pour la première fois. C’est la quatrième tournée et le bassin des fidèles est épuisé depuis longtemps. Le spectacle nous colle à la peau et on ne s’en plaint pas. Un succès fait du bien, pose la question: pourquoi? Donne envie de trouver la recette… qui n’existe pas. Surtout, surtout, le succès permet une reprise du souffle dans la création.

Tournée de Conte du jour et de la nuit
Montréal-Nord…
LaSalle… évidemment, on y retourne. Comment pourrions-nous ne pas y retourner? Nous avons les lieux inscrits dans le corps et dans l’histoire, grâce à Rachel Laperrière et Marcelle Pallascio.
Saint-Laurent…
Pointe-aux-Trembles… (Petit saut dans le temps qui dit bien comme les mentalités évoluent au Québec : en 2013, j’y faisais une première résidence d’écriture dans les écoles pour un texte qui n’a pas encore trouvé son point final…)
Pierrefonds…
Saint-Léonard…
Sainte-Geneviève… Diane Perrault… longue complicité.

Conte du jour et de la nuit, mise en scène Gervais Gaudreault, Le Carrousel, 1991. François Trudel, Jean-Guy Viau. Photo: Yves Dubé

Conte du jour et de la nuit, mise en scène Gervais Gaudreault, Le Carrousel, 1991.
François Trudel, Jean-Guy Viau.
Photo: Yves Dubé

Tournée de El Ogrito au Mexique.
Aguascalientes…
Aguascalientes! Le Festival Telon Abierto! Dernières représentations de Mireille au Mexique… Après Telon Abierto, on peut comprendre. Le stress, la tension, les répétitions pour jouer, pour lire, pour jouer, pour lire en attendant le décor…! Pierre-Luc Ménard remplace  François pour deux misérables petites représentations… Il répète deux mois en espagnol. Deux mois de travail avec Mireille, coach et stress… pour jouer deux fois seulement et dans une langue étrangère! La première et la dernière. Pauvre Pierre-Luc! Il n’y a eu ni première ni dernière, mais deux lectures… On a reçu le décor le soir de la dernière lecture. Les techniciens ont juste eu le temps de vérifier le contenu des caisses avant de les refermer et de les renvoyer au transporteur… On soupçonne que la mordida (le pourboire) aux douaniers n’était pas suffisante… malgré les efforts du festival, de la Délégation générale du Québec et, à l’époque, Isabelle Gélinas… amoureuse… des deux pays, amoureuse des arts et des artistes, amoureuse… qui ouvrait les portes ou défonçait les murs selon les besoins. Tout l’amour du monde ne peut rien contre des douaniers entêtés ou affamés. Par contre, le public, encore plus disponible que normalement si c’est possible, a reçu les deux lectures comme… un miracle.

Aléas de la tournée… Tellement nombreux… mémorables même si, dans l’accumulation quotidienne, on en oublie de juteux, de dramatiques, de loufoques. Oui, j’ai oublié de raconter l’accident de Carole Chatel dans Salvador qui s’est cassé le pied en Suisse… sur une flaque de glace malencontreuse. Carole remplacée au pied levé, c’est le cas de le dire, par la comédienne suisse Dominique Favre-Bulle… le temps des représentations en Suisse. Puis par Momone, notre Momone, Monique Richard qui a répété à Genève puis en France, et a repris le rôle pour le reste de la tournée. The show must go on.

Salvador… Oublié de raconter l’épisode où Gervais a remplacé à pied levé Jean-Guy, cloué au lit.  À 6h du matin, Gervais apprend que Jean-Guy est malade… Gervais raconte qu’à la première représentation, complètement traqué, il se lisse soigneusement les cheveux pour refaire bien droit la raie en plein milieu avant de sonner chez Bianca Albacarra… comme le faisait Jean-Guy. En le faisant, il se rend compte… qu’il n’a pas de cheveux! La peur d’oublier de NE PAS se lisser les cheveux pendant la représentation de l’après-midi, le rend malade… Du coup, Jean-Guy guérit et Gervais prend le lit. Qu’est-ce que les acteurs ont été heureux de donner des notes à leur… metteur en scène!

Pendant que la compagnie tourne, la rue Parthenais vit.

Est-ce en 2001 que Gabriel nous quitte avec lettre et larmes, lui qui avait peur de prendre racines sous son fauteuil? Gabriel, notre irremplaçable… qu’on croise heureusement dans la culture et dans le théâtre. Est-ce en 2001 que Yvon Perrier entre comme Gabriel au secrétariat et qui, comme Gabriel, devient rapidement indispensable… à la diffusion et aux communications? Est-ce l’année où Josée di Lalla remplace Yvon, prend le poste de Yvon? Avec Odette, on en a connu, des changements de poste! Elle parlait, et avec raison, d’enrichissement de la tâche… et ne se gênait pas pour réaménager…

Est-ce l’année où?
L’année où?
L’année de?
Des trous.
Beaucoup de trous.
Trop de trous…
Mais une fréquentation quotidienne de Petit Pierre.
Sûrement!
C’est inévitable.
Je fouille, je dévore, je me laisse séduire, j’admire et j’adore ce petit homme qui nous émeut si fort.
Je veux comprendre.
Gervais… est lui aussi aux prises avec le manège fabuleux,
la mécanique du manège fabuleux,
les mots qui racontent Petit Pierre, le manège et le siècle traversé.
Conception, réalisation, essais, répétitions.
La logique implacable de la création.